Massimiliano Baldassarri dessine un tarot imaginaire dont les arcanes majeurs sont des chimères associant des parties de corps humain à des membres d’animaux fantasmatique et équipés de prothèses artéfactuelles, notamment des grilles circulaires, d’aération ou de scaphandre.
Ces arcanes mutants sont ordonnés et accrochés sur trois lignes qui reprennent les trois septénaires du tarot que traverse Le Mat, carte sans numéro qui figure le fou, souvent interprété comme un voyageur – sur le chemin de la vie – ou un artiste.
Cet arcane isolé, Baldassarri lui a donné le nom de Sycorax, affreuse sorcière shakespearienne dans la pièce La Tempête. Ce personnage est souvent relu à la lumière des recherches postcoloniales qui l’interprètent comme une représentation de la femme africaine réduit au silence. (Morte avant le début de la pièce, Sycorax n’a aucune réplique.) Pourtant l’artiste ne défend aucune thèse.
Cet ensemble de dessins est une exploration jubilatoire et soigné des possibilités de création à partir d’un vocabulaire formel circonscrit. En cela, il se rapproche plus de la démarche d’un Italo Calvino qui, dans Le Château des destins croisés, combine les cartes de tarot pour générer de multiples histoires.
David Lemaire.
Sycorax et les vingt et une mutations majeures, 2023 (22 dessins, acrylique sur papier)
75e Biennale d’art contemporain du Musée des beaux-arts de La Chaux-de-Fonds / 22.10.23 au 2.2.2024
(premier plan: Festum de Mehryl Ferri Levisse) / crédits images: Reto Duriet / M.B.